Comment moderniser son infrastructure réseau quand les fibres manquent ?

Rubrique : Facultatif
Date de publication : 24 mai 2022

Depuis quelques mois, nous assistons à une tension grandissante sur l’approvisionnement des câbles optiques destinés aux infrastructures réseau. Cela se traduit par une inflation significative du prix des fibres optiques et un allongement des délais de livraison inédit, pouvant atteindre une année dans certains cas, en comparaison de quelques semaines, voire quelques jours en temps normal.

AT&T en a notamment fait les frais en 2021, en étant obligé de reporter à 2022 l’installation de 500.000 lignes FTTH, faute de fibres, et combiné à la crise des semi-conducteurs en cours, réduisant également l’accès aux terminaux actifs(1).

Des raisons circonstancielles aux pénuries de fibres

Ce phénomène trouve principalement une explication dans la conjoncture du marché actuel : hausse de la demande, choix des fabricants de stopper certaines productions, capacités de production insuffisantes ou sous-optimales, production à l’arrêt en Chine en raison de la pandémie.

On peut alors prévoir un retour à la normale relativement rapide concernant les délais de livraison, le temps d’ajuster les moyens de production et d’investir dans des chaînes logistiques plus locales, plutôt que de concentrer la totalité de la fabrication en Asie. C’est notamment ce qu’explique Mike Bell, GM de Corning fin 2021, justifiant l’investissement de lignes de productions en Pologne pour soutenir la demande en Europe, ou encore des usines au Mexique pour assurer les livraisons en Amérique du Nord.

Gageons que cette crise reste passagère et on peut s’attendre légitimement à un retour progressif à la normale, dès 2023. Pour autant, en prenant un peu de recul, il existe des raisons plus profondes de s’interroger sur l’avenir de la filière.

Des raisons systémiques à craindre pour le futur

Les câbles à fibre optique sont essentiellement constitués de plastique et de verre (silice), 2 matières premières abondantes qui n’ont semblé souffrir d’aucune limite de stock jusqu’à présent. Cependant, la demande croit continuellement quand les réserves elles ne sont pas illimitées(3,4).

Il est évidement peu probable que les fabricants de fibre optique découvrent du jour au lendemain qu’il n’existe plus aucune plage de sable industriel exploitable, ou que la dernière goutte de pétrole a finalement été extraite du sous-sol terrestre.

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Terminal minier de sable

Pour autant il est établi que les matières premières, de moins en moins accessibles, demandent des techniques d’extraction de plus en plus sophistiquées, dans des environnements de plus en plus complexes.

A titre d’exemple, le pic de pétrole conventionnel, a été atteint selon toute vraisemblance entre 2010 et 2020, et les productions futures se tournent vers le pétrole non conventionnel (pétrole de schiste, sables bitumineux, extraction en eaux profondes), dont l’extraction complexe et coûteuse pose par ailleurs la question de la rentabilité.

La disparition du pétrole n’est donc pas pour demain, car le pic de pétrole est tout simplement la rencontre entre un coût d’extraction qui ne cesse de grimper, et un prix maximum du baril que nous sommes prêts à payer.

Tout cela impacte directement le prix des matières premières et donc le prix du produit fini, sans parler des coûts de transports qui risquent également d’exploser dans la décennie à venir. Cumulé à la hausse inexorable de la demande, il y a fort à parier que cette inflation va se poursuivre sur le long terme.

Des fibres disponibles, mais personne pour les installer…

Le dernier point de tension concerne cette fois-ci la main d’œuvre qualifiée pour installer les centaines de millions de km de câbles à fibre optique chaque année. La demande est croissante, mais le nombre de techniciens lui n’évolue pas en conséquence. Nombre de projets se trouvent bloqués ou reportés par manque de techniciens, ces derniers croulant sous les demandes(7).

AROONA, la solution passive qui augmente la bande passante des fibres existantes

AROONA est un boitier passif transformant les fibres existantes multimodes (OM1/2/3/4…), limitées en bande passante, en fibre monomode qui présente des capacités de débit bien plus importantes.

En exploitant l’infrastructure existante à son maximal, AROONA permet de s’affranchir de la nécessité de recâbler, faisant fi de toute difficulté d’approvisionnement en restant relativement insensible à la hausse du prix des matières premières.

De plus, avec AROONA, le temps nécessaire à la modernisation d’un réseau est réduit d’un facteur pouvant atteindre 10, et ne mobilisera les techniciens d’installation que pour un temps réduit (quelques heures à quelques jours selon le nombre de liens). Ces derniers n’interviennent qu’au niveau des armoires réseau, facilitant ainsi grandement l’installation.

Recycler les câbles, mission impossible ? Continuez à les exploiter alors !

Bien que les plastiques et le verre individuels qui composent les câbles à fibre optique puissent techniquement être recyclés comme des déchets ordinaires, leur séparation est assez difficile et prend du temps.

Pire encore, la valeur de rebut, c’est à dire la valeur marchande directe des matériaux de base, n’a jamais été très précieuse. De plus certains matériaux utilisés pour le renforcement du câble comme le Kevlar ne sont tout simplement pas recyclables.

Il en résulte que les anciens câbles extraits lors de leur remplacement par une fibre plus neuve sont simplement détruits ou stockés dans des décharges, avec l’impact écologique que cela implique : les fibres optiques jetées il y a près de 40 ans sont toujours dans des décharges, et les experts pensent que les déchets de câbles pourraient durer plus de 500 ans.

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Anciennes fibres optiques dans une décharge

La solution AROONA permet de continuer à exploiter des fibres, qui bien qu’âgées de plusieurs dizaines d’années, gardent leurs caractéristiques optiques sans altération, et sur des périodes pouvant excéder 100 ans(5).

L’impact environnemental de la production de fibre
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Au-delà des problématiques de recyclage évoquées, penchons-nous sur le coût environnemental de la fabrication du câble à fibre optique. De l’extraction des matières premières, en passant par l’énergie nécessaire aux procédés de fabrication (extrusion, laminage, etc) jusqu’au transport, la production de fibre optique génère des quantités de CO2 phénoménales(6). On rappellera notamment que le verre est fabriqué à partir de fusion de sable porté à 1.500°C !

Lorsqu’un réseau local dispose déjà d’un câblage existant, l’impact environnemental lié à la modernisation de l’infrastructure peut être largement réduit (jusqu’à un facteur 100) en optant pour une solution boostant le débit des fibres en place, plutôt que de remplacer ces fibres par de nouvelles.

En utilisant la solution AROONA, la modernisation d’une infrastructure permet d’avoir un réel impact sur la réduction de l’impact carbone en comparaison du remplacement de fibres optiques. Du coût énergétique de la fabrication à la difficulté de recyclage des anciennes fibres, en passant par le bilan carbone lié au transport et au génie civil, ce sont des tonnes de C02 économisées à chaque projet !

Sources:

(1) « AT&T delays 500,000 fiber-to-the-home builds due to severe fiber shortage » – Lire l’article (en anglais)

(2) « Corning GM says fiber lead times are ‘much longer’ than a month » – Lire l’article (en anglais)

(3) « What is industrial sand » – Industrial Minerals Association – Lire l’article (en anglais)

(4) « Sand becomes « increasingly scarce and expensive », threatening glassmaking and construction – Dezeen – Lire l’article (en anglais)

(5) « Lifetime Prediction of Fiber Optic Cable Materials for Nuclear Power Applications: Evaluation of Failure Mechanism, End of Life Criteria and Test Methodology » Lire la publication (en anglais)

(6) Accéder au haut débit sur votre campus : quel impact carbone ? – Lire l’article de blog

(7) « Labor shortages in broadband are likely to slow deployment » – The Center for Growth and Opportunity or the views at the Utah State University –Lire l’article (en anglais)


Jean Philippe Pastille

Par Jean-Philippe Gauthier

Jean-Philippe Gauthier est titulaire d’un doctorat de physique, obtenu à l’INSA de Rennes en 2011. Après 5 années passées dans l’industrie en tant que chef de projet dans le domaine des objets connectés et de l’usine 4.0, il rejoint Cailabs en 2020 où il assure la fonction d’ingénieur avant-ventes pour la gamme de produit AROONA.

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